Les carburants d’aviation durables (ou Sustainable Aviation Fuels – SAF) sont définis comme des carburants renouvelables ou dérivés de déchets qui répondent aux critères de durabilité. Ces carburants sont considérés comme la solution offrant le plus grand potentiel de réduction des émissions de CO2 par le secteur aéronautique.  Mais de quoi s’agit-il exactement et quels sont les acteurs principaux dans ce domaine?

A ce jour, les carburants durables représentent plus de 450 000 vols effectués, plus de 100 millions de litres produits en 2021 et environ 17 milliards de dollars de contrats d’achat à terme en 2022, selon l’International Air Transport Association (IATA). Plus de 50 compagnies aériennes ont désormais une expérience de ces Sustainable Aviation Fuels, ou SAF, et les jets d’affaires sont les mieux armés pour voler avec ce carburant.

Émissions nulles en 2050

Plusieurs organismes internationaux font la promotion des carburants d’aviation durables. Tel est le cas de l’OACI, l’Organisation de l’aviation civile internationale, qui s’efforce de faciliter le développement et le déploiement des SAF. D’abord avec la définition de normes environnementales mondialement reconnues pour ces SAF: le programme CORSIA permet aux exploitants d’aéronefs de réduire leurs contraintes en matière de compensation par l’utilisation de ces carburants, y compris des critères de durabilité et des méthodologies de cycle de vie acceptés au niveau mondial. 

L’OACI a également adopté un objectif mondial ambitieux à long terme pour l’aviation internationale, à savoir des émissions nettes de carbone nulles d’ici 2050, à l’appui de l’objectif de l’Accord de Paris. Le rapport du LTAG démontre ainsi clairement que les SAF offrent le plus grand potentiel pour réduire les émissions de CO2 de l’aviation internationale.

L’Europe à la pointe

Parmi les exemples de l’intérêt croissant des raffineries et des entreprises de production d’énergie diversifiée pour renforcer la production de SAF en Europe, il y a Neste, qui investit à Rotterdam afin de permettre la production à partir de déchets et de résidus de matières premières, et BP à Lingen, en Allemagne. BP a commencé à produire des SAF dans sa raffinerie en traitant conjointement des huiles de cuisson usagées et du pétrole brut. L’usine de Lingen est la première installation industrielle en Allemagne à produire du SAF à partir de biomasse provenant de déchets et de résidus.

La société autrichienne OMV a également commencé à produire du SAF par traitement de matières premières, notamment des huiles de cuisson usagées, dans sa raffinerie de Schwechat. Elle prévoit d’augmenter sa propre production d’environ 2000 tonnes cette année à plus de 700 000 tonnes par an d’ici 2030.

L’IATA prévoit que les fournisseurs produiront 5 milliards de litres de SAF d’ici 2025, contre seulement 100 millions de litres l’an dernier. Une étude indépendante du Centre Aérospatial Néerlandais NLR estime que l’Europe pourrait représenter 50% de la capacité de production mondiale en 2030. Les technologies choisies diffèrent souvent d’un pays à l’autre en fonction de la stratégie de transition énergétique des gouvernements et de la disponibilité de matières premières durables – biomasse ou énergie verte et CO2 – appropriées à la production de ces nouveaux carburants.

L’analyse du NLR montre que la quantité projetée de SAF produite d’ici 2050 à partir de matières premières qui seraient disponibles aux Pays-Bas ne pourrait répondre qu’à une «fraction» de la demande de carburant prévue. «Le potentiel d’approvisionnement en kérosène synthétique est plus important et pourrait être suffisant», selon les auteurs. Plusieurs entreprises ont lancé des projets de carburant synthétique, notamment la start-up Synkero, qui prévoit de développer une usine commerciale capable de produire 50 000 tonnes de carburant synthétique par an.

En Allemagne, la première usine industrielle de «Power to Liquid» au monde, située dans le nord-ouest du pays et exploitée par l’ONG atmosfair fairfuel, est entrée en service à la fin de l’année dernière, avec Lufthansa comme client pilote. Le groupe s’est engagé à acheter au moins 25 000 litres d’e-kérosène par an au cours des cinq prochaines années.

Parmi les SAF, les carburants solaires, des carburants synthétiques produits à partir de l’énergie solaire, tiennent une place à part. C’est une entreprise suisse, Synhelion, qui est leader sur ce marché. Le carburant solaire est ainsi considéré comme la solution la plus économiquement viable et efficace pour un transport propre sur de longues distances. 

Et dans l’aviation d’affaires?

Une étude d’Airbus Corporate Jets a révélé que 86% des cadres supérieurs d’entreprises américaines pensent que le SAF contribuera à la croissance du marché de l’aviation d’affaires car elle permettra de mieux contrôler l’impact environnemental des vols.

«Le secteur de l’aviation d’affaires est parfaitement conscient de la nécessité de trouver des moyens de réduire l’impact des vols sur l’environnement», souligne Sean McGeough, vice-président commercial ACJ pour l’Amérique du Nord.

L’EBAA – European Business Aviation Association défend l’utilisation du carburant d’aviation durable, car elle considère les SAF comme une alternative viable et certifiée au carburant fossile et comme un élément clé dans l’engagement de l’aviation d’affaires en vue de réduire les émissions de ses opérations.

Le Parlement européen a voté en juillet passé en faveur de la proposition ReFuelEU Aviation de la Commission européenne visant à introduire une obligation d’augmenter le pourcentage de carburant d’aviation durable pour tous les vols quittant l’Union européenne à partir de 2025.

«Il s’agit d’un pas en avant important, explique le secrétaire général de l’EBAA, Athar Husain Khan. L’EBAA est depuis longtemps un défenseur du système SAF Book and Claim, car celui-ci aidera les opérateurs d’avions d’entreprises à contribuer à la décarbonisation du secteur et à utiliser plus efficacement les SAF actuellement disponibles.»

L’utilisation de carburants d’aviation durables entraîne une réduction de 80% des émissions de CO2 du secteur aéronautique. Ils sont totalement compatibles avec les aéronefs actuels et ne nécessitent donc pas de coûteuses ruptures technologiques. Ils représentent donc une formidable opportunité pour l’aviation d’affaires de devenir leader dans l’évolution durable du secteur aéronautique dans son ensemble.